La banlieue c’est pas rose, Monaco c’est Moroz !

 

Le Russe Alexander Morozevitch avait promis qu’il arrêterait. Il est revenu en flèche et a rattrapé Anand au classement combiné (aveugle + rapide) du tournoi privé du Melody Amber à Monaco terminé le 30.03. Chaque année, le mécène néerlandais Van Oosterom organise un tournoi avec ses invités. En gros, et dans l’ordre, il prend :

– les meilleurs du monde du moment

– un ou deux top jeunes qui monte (Vallejo, Aronian cette année)

– ses potes (Kasparov n’est ainsi jamais venu).

 

Pour la bourse des prix, c’est hallucinant et sympathique. Pour les joueurs, c’est une rente sympa, sans incidence sur le Elo et sans stress.

L’équipe d’organisation fait nager les joueurs dans le luxe ; pour les quelques spectateurs admis, le GMI yougoslave Ljubojevic fait l’animateur de service. Polyglotte, vivant à Linares (suite à un tournoi, il a épousé une autochtone), c’est toujours un spectacle de le voir se lancer dans telle ou telle analyse.

Précisions : Van Oosterom fait le même tournoi pour le snooker, une sorte de billard anglais retransmis à la télévision et aussi passionnant que le curling. D’ailleurs l’un des champions de la discipline a un visage tellement expressif que les Anglais l’appellent ‘mister Interesting’. D’autre part, Van Oosterom était un fort espoir néerlandais avant vingt ans, a fait fortune et s’est reconverti dans le jeu par correspondance où il est devenu champion du monde, aidé par quelques GMI, mais c’est sans conséquence puisqu’il est très fort quand même et que ses adversaires jouent tous avec un moteur de recherche…

 

Donc Morozevitch. Le Moscovite nous avait promis dans un entretien à New in Chess qu’il arrêterait la compétition. Non, mais ! Quel toupet pour quelqu’un qui a osé jouer un Gambit du Roi à Kasparov à Paris (France) dans un tournoi Immopar. Un ou deux tournois et quelques adversaires pulvérisés plus tard, l’homme au costume mao est revenu sur sa décision. Merci pour nos yeux.

À Monaco, Morozevitch a cartonné dans le jeu « à l’aveugle » (8 gains et 3 nulles sur 11 parties, victoire sur Anand), nettement moins dans les parties rapides (5 points sur 11). Attention, à l’aveugle veut dire que les joueurs se font face, ordinateur contre ordinateur, lequel affiche un échiquier sans pièces. Ils cliquent pour déplacer les pièces virtuelles. Cela évite les erreurs de transmission à l’ancienne, quand le coup était dicté. Un faux coup fait perdre la partie a tempo grâce à l’ordi vérificateur.

Cette fois, Moroz n’a pas eu de panne d’oreiller comme dans le championnat du monde de San Luis où il a perdu une partie par forfait. Il n’a pas plus souri non plus. Son style est pourtant à la limite du loufoque, mais tellement créatif. Morozevitch devrait passer plus souvent à la télévision. En costume trois-pièces. Car lui, c’est vraiment ‘mister Interesting’.