Je veux manger du Topalov

Comment arrêter ce champion du monde ? Voyons, il gagne les tournois comme pratiquement jamais des champions ne l’ont fait : il perd des parties, beaucoup plus que ce que les tournois fermés plan-plan nous ont habitués. Il gagne. Il gagne. Et regagne. Son fantastique « retour » n’est pas vraiment un retour. C’est pas du jeu puisque dans un tournoi fermé, on connaît l’ordre de ses adversaires la veille de la première partie. Mais pour Topi, ça n’a pas d’importance, il a toujours foncé tête baissée.

Comment en est-il arrivé là maintenant que tout le monde lui fait des courbettes et lui tresse des lauriers ? Eh bien ! en combinant le jeu et l’excellence d’un manager. Topalov a débuté avec son ami MI Silvio Danailov sur le circuit espagnol. Il a moissonné tous les tournois et a donc longtemps et naturellement affûté son style vers l’attaque. D’ami, Silvio est devenu père poule. Et voyant que sa poule prenait du grain, Danailov s’est retiré de la compétition et a mis ses talents au service de ce qui était devenu en quelques années une bête de course. Inutile de le doper, Topalov le fait tout seul : c’est une machine à analyser. Même Danailov n’arrivait pas à l’obliger à se coucher parfois ! Aujourd’hui, Topi sous-traite avec des secondants. Et il arrive tout frais, avec plein d’agressivité. Quitte à perdre. Quitte à beaucoup gagner aussi. C’est ça les échecs modernes : la nulle, connais pas. Tant mieux. Et tant pis pour ces nulles où l’on arrête de jouer à la moindre nouveauté théorique qui fait peur et qui remplissent les pages de L’Informateur... Le génie de Topalov aujourd’hui, c’est qu’à l’instar des Vikings dans Astérix, il ignore la peur. Kasparov admire « ses » prédécesseurs. Il nous a laissé un digne successeur. Car en plus, Topalov nous crache de superbes parties.

 

Photo: © chuchogm