Affaire Andruet : un acquitté, un condamné… par contumace

Joseph Liany, 56 ans, a été acquitté vendredi 17 mars 2006 par la cour d’assises d’appel du Val-de-Marne au terme d’un délibéré de près de six heures, du meurtre de l’ancien champion d’échecs Gilles Andruet, en 1995. Condamné à quinze ans de réclusion criminelle par la cour d’assises de l’Essonne en novembre 2003, son fils Franck n’avait pris que sept ans pour « recel de produit d’un meurtre » en 2003 et était en liberté conditionnelle depuis. Il n’avait pas fait appel. Voir le compte rendu du premier procès sur le site de Notzai.

Précision technique : en appel, il y a 12 jurés et toujours les 3 magistrats soit 15 votes. Joseph Liany ayant été acquitté, il y a donc eu au plus 9 personnes l’ayant reconnu coupable, les votes blancs favorisant l’accusé. Autrement dit, 6 votes au moins ont douté de la culpabilité de Liany, votes blancs inclus. C’est le principe de la majorité qualifiée, bien expliqué sur le site du ministère de la Justice (voir audience et délibéré/délibération sur la culpabilité).

L’avocat de l’accusé, le même qu’il y a trois ans, Me Lef Forster, s’est félicité de ce verdict. Il y a de quoi, tant ce genre de retournement par rapport à une décision en première instance est rare. Toute sa défense a été basée autour de deux axes d’après les personnes qui ont assisté aux débats : 1) présenter son client comme un pauvre type trempant dans des carambouilles mais certainement pas un tueur. 2) Insister, marteler sur le doute scientifique du poil retrouvé dans l’alèse entourant le corps de Gilles retrouvé le 22 août 1995 dans l’Yvette.

En effet, scientifiquement, ce poil peut également appartenir à quelqu’un de même lignée maternelle. Donc à l’autre accusé (mais en fuite) Sacha Rhoul, fils de la sœur de Joseph. Comme lors du premier procès, il n’y avait pratiquement pas de témoins… et le président n’a pas, tout comme celui de première instance, usé de son pouvoir discrétionnaire comme l’y autorise la loi, obligeant quelques-uns d’entre eux à venir s’expliquer. Le cas Sacha Rhoul avait été disjoint du dossier des Liany. Le 6 avril 2006, il a été condamné par contumace à 15 ans de réclusion criminelle.

Voilà. La mort de Gilles Andruet reste toujours impunie. Sa vie s’est arrêtée à 37 ans et on n’a toujours pas fait toute la lumière sur cette affaire qui sent la poudre… Les médias ? Une dépêche de l’Agence France Presse le soir du verdict. Conséquemment un ou deux articles par ci par là dans des quotidiens régionaux. Rideau.

 

Le jeu de cette famille

« Dans la famille Rhoul-Liany, je demande… »

Sacha Rhoul : mis en examen pour meurtre. En fuite depuis l’automne 2001. Condamné à 15 ans de réclusion criminelle par contumace le 6 avril 2006. Tient un hôtel de luxe à Marrakech où nombre de stars françaises et d’hommes politiques viennent bronzer. S’était fait piéger en caméra cachée en début d’année lors du reportage de M6 sur l’affaire.

Maman (Sylvia) Rhoul : grande absente du premier procès et pourtant souvent citée… Connaît beaucoup, beaucoup de monde dans le showbiz et la politique. Profession : « Officiellement ou officieusement ? » demanda son frère Joseph Liany, faussement naïf, au président Coujard lors du premier procès en 2003, quand ce dernier l’interrogeait sur le rôle que sa sœur jouait lors de ses visites quand lui-même et son fils étaient en prison : « Officiellement, répondit J. Liany très nature, elle tient un salon de beauté. Officieusement, un bordel près de [la place de] l’Étoile .»

Joseph Liany : inculpé pour meurtre puis incarcéré le 25 avril 2001. S’est retrouvé seul dans le box malgré les trois autres accusés (Sacha Rhoul en fuite, le suicidé Loïc Simon, et son fils comparaissant libre en 2003). Acquitté en appel. Va être dédommagé par l’État français pour ces cinq années passées en prison.

Franck Liany : fils du précédent, incarcéré en même temps que Papa. Ancien gérant du club de l’Étoile. Reconverti depuis sa conditionnelle dans une mini-sandwicherie non loin d’une célèbre librairie d’échecs spécialisée dans le Quartier Latin. Condamné en 2003 à sept ans et vivait sous le régime de la conditionnelle après avoir purgé deux ans et demi. A encore désigné son père mercredi 15 mars 2006, à la barre : « Loïc Simon, [le troisième passager désigné de la voiture, qui s’est suicidé en 1996], m’a dit qu’il était ce jour-là avec mon père, que les faits s’étaient passés à Bonneuil-sur-Marne » (où habitait Joseph Liany).

Loïc Simon : aucun lien de parenté avec les précédents. Pote de Sacha Rhoul et serveur dans cet établissement quand Gilles était encore vivant. Son nom revient sans arrêt dans le dossier. Retrouvé pendu en 1996. Aurait déclaré à des proches, plusieurs mois avant de mettre fin à ses jours, qu’il avait participé au meurtre d’un « joueur d’échecs ». Sa famille doute de son suicide.