Triche supposée: la FFE déboutée et condamnée aux dépens

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L’ordonnance de référé du TGI de Nanterre est tombée le 10 mars dans l’affaire opposant la FFE et les maîtres Marzolo, Feller et Hauchard.

La FFE ne pourra avoir communication des textos entrants et sortants du téléphone portable de Cyril Marzolo au nom de l’article de la loi du 10 juillet 1991 sur le secret des correspondances privées. Mme Pomian était le titulaire de cette ligne.

Déboutées de ses demandes donc, la FFE a de plus été condamnée à verser au titre de l’article 700 du NCPC: 2500 euros à Marzolo, 2500 euros à Feller, 2000 euros à Hauchard, et 500 euros à SFR.

Que demandait la FFE? Pourquoi la Fédé a-t-elle gaffé en modifiant sa demande à l’audience? Où est la vérité juridique? En quoi ce jugement pèsera-t-il sur la Commission de discipline? Le communiqué fédéral suite à ce jugement. Suite insoutenable: cliquer ligne suivante.

Que demandait la FFE?
La Fédération avait assigné les trois joueurs et SFR Service Clients afin d’obtenir la désignation d’un huissier de justice. Le but? Obtenir les messages entrants et sortants du téléphone portable de Marzolo sachant que Mme Pomian est titulaire de la ligne. Cette communication aurait apporté, selon Mme Pomian, la preuve d’une collusion entre un Marzolo émetteur, un Hauchard dans la chaîne, un logiciel d’échecs assistant de manière illicite le joueur sur l’échiquier, à savoir Feller, le tout  pendant la dernière Olympiade en octobre 2010, à Khanty-Mansiïsk, terre sibérienne où l
homme chassa le mammouth il y a fort longtemps.

La FFE modifie sa demande à l’audience!
Encore ein großer Fehler une grosse faute! La fédération a modifié sa demande devant le juge des référés. En général, ce n’est pas bien pris…

Voilà ce que l’on lit dans le jugement: « A l’audience du 24 février, 2011, Mme Pomian intervient volontairement à l’instance. Après avoir exposé qu’en sa qualité de titulaire de la ligne téléphonique litigieuse, elle dispose, depuis l’espace client du site internet de la société SFR, de l’accès au contenu des messages échangés, ce que M. Marzolo ne pouvait ignorer, elle fait valoir qu’elle a pu ainsi obtenir de bonne foi, sans fraude ni recours à un procédé déloyal, aux messages échangés entre MM. Marzolo et Hauchard, de sorte qu’elle peut être autorisée à les remettre à la fédération sans que ne puisse être opposé le secret des correspondances. A titre subsidiaire, elle demande la désignation d’un huissier de justice avec pour mission de retranscrire le contenu des messages dont il aura pu prendre connaissance depuis l’espace client du site internet de la société SFR. »

Après cette intervention, la fédération plonge également! Elle se désiste de sa demande initiale « se joignant aux demandes de l’intervenante ». Exit donc la demande vis-à-vis de SFR qui réclame en passant 1500 euros au titre de l’article 700 du style, on m’a fait déplacer pour rien. Opposition groupée des avocats des trois joueurs qui arguent de l’article de la loi de 1991 sur le secret des correspondances privées.

Pourquoi être intervenu?
Mme Pomian pouvait lire les messages entrants et sortants écrits par Cyril Marzolo. Et pas seulement: les fonctions de la gestion d’une ligne sur le portail de l’opérateur permettent aussi d’avoir accès aux messages laissés sur le répondeur vocal.
Mais comprenant que SFR ne peut satisfaire les demandes fédérales pour des raisons à la fois juridiques et techniques, la Fédé s’est rabattue sur les messages qu’elle juge litigieux depuis le début et qui ont déclenché la mise en cause des trois titrés. D’où ce revirement.
Mme Pomian pense alors produire la correspondance à l’audience. Mais ceci est impossible car comme l
’écrit le juge des référés, « aucune disposition légale ne confère au juge des référés de pouvoir lever le secret des correspondances. »

Que dit le juge des référés?
« Le fait que cette dernière
[Mme Pomian] soit la signataire du contrat d’abonnement et qu’elle dispose de la faculté d’accéder au contenu des messages échangés grâce au dispositif technique mis à disposition par la société SFR depuis son site Internet, ne la dispense pas de l’obligation légale de respecter le secret des correspondances ».

Que va faire la Commission de discipline le 19 mars?
Elle va entendre les arguments des uns et des autres.
Les joueurs: c’est simple, ils nient et ce jugement protège la correspondance émise ou reçue à partir du téléphone portable de Marzolo. Leur défense est groupée et le fait que le portable de Marzolo ait été entre les mains de Mme Pomian jouera finalement en faveur de ce joueur.
La Fédé: elle va produire des témoignages affirmant que les joueurs ont avoué avoir triché. Et dautres nouveautés pour épaissir le dossier?

Le « coup de pat » de la Fédé
Petit « pat » fédéral avec la décision du juge des référés: il n’y a plus de lisibilité juridique des messages, aussi bien par SFR que par un autre moyen à cause de la loi de 1991 sur la correspondance privée.
La FFE produira-t-elle toutefois le contenu de ces messages devant la Commission sachant qu’ils n’ont pas été constatés par huissier?

Qui a vu quoi?
Ce qui aurait été vu ou lu sur le téléphone-portable-de-Marzolo-payé-par-Mme Pomian est-il acceptable voire accablant devant une Commission de discipline ET d’éthique? Au fond, la loi de 1991 ne bloque-t-elle pas tout, même si, un temps, Mme Pomian a pu lire à satiété la correspondance de son subordonné? Réponse le 19/3.

Dura lex sed lex?
Enfin, la FFE ayant loué une grande salle, on espère avoir du PowerPoint, de l’image, des films de Sibérie avec ou sans reportage sur les mammouths, bref de l’animation. Car à moins d’autres éléments de preuve que la Fédération produira le 19 mars, juridiquement, le dossier semble dur à tenir. Même si trois joueurs auraient triché ou auraient couvert des tricheries. Dura lex sed lex.

Le communiqué fédéral
Dans son com
muniqué publié en fin de journée le 10 mars, la FFE tient un langage apparemment contradictoire: « Ainsi qu’elle l’avait annoncé par un communiqué le 27 janvier dernier, la FFE se réserve donc le droit de saisir le juge pénal, qui pourra lever le secret des correspondances. » avant de poursuivre dans le paragraphe suivant: « Quoiqu’il en soit et compte tenu de la décision du Juge des Référés, la FFE, qui prend acte du refus catégorique des défendeurs de voir ces pièces remises à un huissier de justice, renonce à solliciter leur communication, qui n’auraient, en toute hypothèse, qu’ajouté aux différents éléments à charge du dossier disciplinaire. »

Enfin, la FFE rappelle qu’elle sera seule juge et semble découvrir le droit. Il est en effet rare qu’un juge des référés se prononce sur le fond d’une affaire: « En tout état de cause, l’ordonnance du juge des référés s’est uniquement prononcée sur la possibilité d’obtenir communication du contenu des sms échangés, sans s’intéresser au fond du litige. C’est en effet à la seule Commission de discipline qu’il appartiendra de se prononcer sur la réalité des faits de triche allégués, lors de son audience du samedi 19 mars 2011 à 10h30, à Paris. »