Quelle est votre partie la plus folle?

On vous demande souvent quelle est votre plus belle partie ou la plus calamiteuse. Dans le premier cas, les exemples vous viennent à l’esprit car vous avez une bonne mémoire et le miroir, le beau miroir a un avantage: il ne vous contredira pas. Dans le second cas, la partie est quelque part, enfouie dans votre cortex. D’ailleurs, avez-vous encore la partie? Non, probablement.

Il reste une troisième catégorie appartant aux deux autres: les parties les plus spectaculaires, les plus boufonnes, les plus incroyables, les plus émotionnelles.
La partie suivante jouée en 1991 à l’un des premiers festivals de Parthenay (Deux-Sèvres) est la plus incroyable que j’aie jamais jouée. Mon roi a traversé tout léchiquier, de ’e1’ à ’a7’. Il aurait même pu aller jusqu’en b8! Alors que la chaleur battait son plein et que la différence Elo (2260 contre 1700) n’aurait pas dû me poser de problèmes, je sentai toutefois avant le début de la partie mon adversaire de 24 ans comme un joueur ’à sacrifice’. L’intuition fut bonne. Et Cyrille Augereau n’allait vraiment pas décevoir la galerie…
Sport, il se laissa mater par le ballet des pièces lourdes et mineures. Cette partie incorrecte sur le plan technique est restée gravée dans nos coeurs: en 1994, au tournoi de Saint-Affrique, on se refit le film autour d
une bonne mousse. Mieux qu’une nulle contre un grand-maître!

Pour voir les moments-clés de la partie, cliquer ligne suivante.

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Incroyable! Les noirs sacrifient une pièce au lieu de reprendre en e5 et suivre les chemins empruntés avec succès par Manouck, Tagnon etc. dans cette variante populaire. Ce qui me frappa fut la détermination des noirs tout en réalisant que ce sacrifice était tout sauf correct.

 

 

16_Re4.JPGBien sûr, à froid, le roi pouvait se réfugier côté dame dès le 14e coup. Il ne restait plus aux blancs qu’à digérer leurs deux pièces supplémentaires. Une pièce, ça va, deux pièces, bonjour les dégâts!
Mais je ne voyais rien contre une expédition au centre… sauf que je me mis à suer de peur en voyant que les noirs pouvaient se permettre 16…Df5+! La dame est alors imprenable sous peine de mat.
Dans cette hypothèse, il aurait fallu faire machine arrière et revenir se cacher à l’aile dame via f3. Mais mes neurones étaient en mode brouillage, et je ne voyais qu’une seule chose: échapper au mat!

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C’est la lutte finale! En jouant 25.Rb8, on aurait pu trouver quelque similitude avec le fameux problème de mat où Napoléon est chassé de Moscou par les Cosaques (le roi blanc est extrait de sa position et se fait mater), mais tuons toute chance d’arnaque face à un valeureux adversaire aux aguets par 26.Dxa6.

Et vous, quelles sont vos parties les plus folles?